Un article où il est question de cuisine, de journalisme et de Mendelson

Mercredi dernier j’ai eu l’occasion d’assister à une conférence d’Alain Joannes qui portait notamment sur l’évolution du métier de journaliste dans le contexte actuel. Je ne me considère pas comme journaliste, loin s’en faut, mais les bouleversements liés au nouvelles technologies me passionnent. Et tout comme l’industrie du disque, le journalisme est en pleine remise en question.

D’une part les quotidiens traditionnels périclitent, d’autre part les blogs spécialisés sont de plus nombreux. Entre les deux, le lecteur qui ne sait plus vers qui se tourner. Qu’est ce qu’une information de qualité ? Comment définir la légitimité d’un journaliste ? Et tout simplement, qu’est ce qu’un journaliste ?

Des questions qui me trottent dans la tête depuis un moment car elles s’appliquent également aux chroniqueurs musicaux. Qu’est ce qu’une chronique de qualité ? Quel est l’intérêt d’une critique musicale sur Internet ?

Il n’existe évidemment pas de réponse tranchée à toutes ces questions. Mais un bref échange avec Alain Joannes m’a permis de mettre le doigt sur une des raisons qui m’ont poussées à ouvrir ce blog.

Une raison purement diététique. La standardisation des radios, des chaînes de télévision et les campagnes organisées par les grandes maisons de disque ont tendance à filtrer la musique écoutée par le grand public. Soit un bon nombre de personnes qui mangent la même chose toute la journée. Un bol de rock au ptit déj, une boite de pop à midi et un plat de dance le soir. Et la musique a meilleur goût (sic, sick). Loin de moi l’idée de cracher dans la soupe, tout comme j’aime bien manger un bon Bicky Burger ou un bon durum, j’aime écouter la radio de temps en temps. Mais à force d’avaler toujours les mêmes trucs, on fini par se désintéresser de la nourriture, de la musique dans le cas présent. Au bout d’un moment, on ne fait plus son marché, on abandonne la complexité et on prend juste ce qu’on a sous la main. C’est ce que Joannes appelle l’inforexie – « un manque d’appétence pour l’information », si vous aimez les gros mots.

Je ne me positionne pas en terme de bon ou mauvais goût. Tout ce que je veux, c’est manger varié et équilibré. Et ce que je préfère, ce sont les morceaux qui restent coincés entre les dents, les groupes qui crockent et les mélanges exotiques. J’ai envie de partager les bonnes adresses avec les connaisseurs et d’épicer le menu du grand public.

La bonne adresse de mercredi, c’était les Flâneries gourmandes. Celle d’aujourd’hui, c’est Mendelson. Un groupe de rock français chaudement recommandé par un magazine qui partage mon goût pour la diversité (Rif Raf, pour ne pas le citer).

Du « rock français » parce que c’est le style musical qui s’en rapproche le plus et que les paroles sont en français. A part ça, aucun lien. Mendelson n’a pas sa place entre Deportivo et Louise Attaque. Pascal Bouaziz écrit des chansons qui n’en sont pas ; musicalement on aussi bien affaire à du jazz qu’à du rock tendu.

Plus de de dix ans de carrière sans jamais percer. Pourtant, il s’agit vraisemblablement d’un des meilleurs groupe français encore en activité. Un groupe d’envergure comme en témoigne ce double album : 16 morceaux dont deux de plus de 11 minutes. Un groupe sans concessions, qui préfère sortir ce quatrième album sur son site, « Personne ne le fera pour nous ». Sans attendre d’être emballé par une maison de disque.

Cause ou conséquence de leur mise à l’écart de l’industrie du disque, leur univers est plutot noir et amer. Une successions d’histoire vraies et
(donc)
déprimantes – « On peut fermer les yeux, mais le monde est toujours là » dit Bouaziz sur « Personne ne le fera pour nous », le morceau le plus enjoué de l’album.

Un peu d’humour parfois (J’aime pas les gens).

Et de la nostalgie aussi. Un sentiment en filigrane de leur oeuvre qui connait son apogée avec 1983 (Barbara), un tourbillon autobiographique à la fois intime et monumental. Un « single » que son format condamne à ne jamais passer en radio. Une introduction puissante qui se trouve à la fin du premier disque. Refus de la facilité ?

Indéniablement.

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Le clip de 1983 (Barbara), si vous ne devez écouter qu’un morceau de Mendelson.

Du reste, leur site propose de nombreux mp3 en téléchargement gratuit (des inédits, un live, une bande originale de moyen métrage…) et leurs deux derniers albums (« Seul au sommet » et « Personne ne le fera pour nous ») en téléchargement payant.

Et pour finir, la chronique très complète de Pinkushion.

  • Cet article a été publié le dimanche 27 avril 2008 à 17:10 et est classé dans Albums, Théma .

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